Midi de la Solidarité « État et Perspectives des mesures de lutte contre la pauvreté en Belgique »
Le 27 Mai 2008, lors du Midi de la Solidarité organisé par Pour la Solidarité, Marion Englert, chercheuse à l’ULB a présenté les résultats de son étude « L’impact de la Croissance Economique sur la Pauvreté et les Inégalités ». Elle a démontré, de manière théorique et empirique, l’inexactitude du postulat qui voudrait que l’augmentation du PIB[1] (croissance économique) ait un impact sur la réduction de la pauvreté.
Tout d’abord, elle a plaidé pour une mesure relative de la pauvreté car la perception de la pauvreté dépend du niveau de vie moyen des sociétés. Ainsi, la solution n’est pas l’augmentation de tous les revenus en cas de croissance économique mais la diminution des écarts entre les revenus d’une population donnée.
Le moteur de la croissance peut être double : la croissance est soit provoquée par une hausse de la productivité ce qui n’entraîne pas automatiquement une plus grande redistribution puisque les taux de prélèvement dépendent de décisions politiques. De plus, la générosité des ménages dont le revenu a augmenté reste constante car avec l’augmentation des revenus naissent de nouveaux besoins. Une croissance provoquée par un accroissement du taux d’emploi aura, elle, un impact sur la réduction de la pauvreté relative à condition que les emplois créés garantissent des conditions de vie décentes et que la politique fiscale reste inchangée afin de permettre un accroissement relatif des revenus de remplacement.
Après cette première démonstration théorique, elle a rappelé que les années 80 ont marqué la fin d’une relation positive entre croissance économique et diminution de la pauvreté de revenu car on assiste, entre autres, à une diminution du rôle de l’Etat, à une exigence accrue de flexibilité, à un recul des taux de syndicalisation et à une plus grande concurrence internationale.
Enfin, elle a comparé les Etats pour constater que ce ne sont pas ceux qui affichent des niveaux de PIB par habitant élevés qui enregistrent les plus faibles taux de pauvreté. Par contre, les taux de pauvreté ont des structures similaires dans les Etats qui appliquent les mêmes types de systèmes institutionnels et sociopolitiques, indépendamment du niveau de PIB par habitant. Par exemple, les pays anglo-saxons, caractérisés par un niveau faible de protection sociale, révèlent des taux de pauvreté importants, à l’opposé des pays nordiques où la protection sociale est élevée et les négociations salariales coordonnées.
Ariane Fontenelle, directrice du Think Tank européen Pour la Solidarité a expliqué comment la Commission européenne tente de lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale en Europe. En 2000 à Lisbonne, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne se sont mis d’accord pour expérimenter une nouvelle méthode de travail pour atteindre au niveau national des objectifs fixés à l’échelle européenne. Ainsi, par exemple, dans le domaine, de l’inclusion sociale, où les compétences restent nationales. Cette méthode, nommée Méthode Ouverte de Coordination (MOC) permet de définir des lignes directrices à l’échelle européenne que chaque Etat doit ensuite traduire en objectifs concrets à atteindre et ceci grâce à la pression exercée par le contrôle des pairs (autres Etats membres de l’UE). Pour plus d’information sur la politique européenne en matière d’inclusion et de protection sociales, voir www.socialprotectioninclusioneu.eu.
Michel Pettiaux, président du Forum Bruxellois de Lutte contre la Pauvreté, a réagi à ces présentations théoriques en apportant l’éclairage d’un acteur de terrain sur les réalités de l’exclusion en Belgique.
Tous ont rappelé l’insuffisance de l’indicateur du PIB pour évaluer les performances générales d’un pays et le rôle majeur des dépenses sociales dans la réduction de la pauvreté. Le débat avec la salle a abouti à la conclusion que la réduction de la pauvreté devait passer par une révision de l’orientation des politiques et par une redéfinition des objectifs prioritaires d’un Etat.
Vous pourrez retrouver les working papers de Marion Englert et Ariane Fontenelle sur le site Internet de Pour la Solidarité, dans la section « Publications ».